Raconter à partir d’archives familiales > Exemples
Exemple Julia ● Exemple Marie ● Exemple Ysé
Ysé, « petite Poucette », comme dit Michel Serres, est le témoignage d’amour d’une mère pour sa fille, née vietnamienne mais devenue française. Ultra-connectée, elle se sent européenne et citoyenne du monde. Les frontières spatiales sont abolies ; les obstacles à franchir sont d’un autre ordre : comment laisser vibrer qui l’on est profondément ? Comment respecter l’autre dans sa différence et continuer à s’entendre dans le bruit que fait le monde ? Comment créer l’harmonie sur une planète à bout de souffle ?
Un réopard (un léopard)
Marcher avec les fesses pieds nus
Je vais m’étousser (m’étouffer)
Manger au toroute (manger dans un restaurant sur l’autoroute)
La bourette (la brouette)
Des dessins allumés (des dessins animés)
Parque parque parque (parce que)
Des patins à roller (patins à roulettes)
Les boucles d’oreilles (les bouchons d’oreille Ear)
Faire de la ragougnasse (une espèce de mélange douteux, on pourrait dire aussi de la bouillasse)
Des sucres d’orge (des soutiens-gorge)
Aller au pestacle au jardin du Lustembourg (le spectacle au Luxembourg)
Le Menu opathie (l’homéopathie)
Papi bœuf day (happy birthday)
Un Tacalogue (un catalogue)
Je fais de la coutoire (couture)
Je suis une bonne ménageuse (ménagère)
Du beurre fané (salé)
La lappe (femelle du lapin)
Pssss, j’ai encore quelque chose à te dire (P.-S. pour post scriptum)
« Madame le mers je trouve que devan l’école élémanter de maintenon il y à des crotte de chien partou. Pourier vou faire des pano ou je ne c’est pa coi parceque il y a teleman de jens sur le trotoire que nou devon désandre et marcher dans la crotte de chien et les cartable à roulette roule dedan, je trouve sa inademisible. »
Le bleu de tes yeux ● La mer d’Erquy ● Le bois du violon ● Moi cachée sous mes draps ● Les câlins dans tes bras ● Les discussions ● La peur quand tu hausses la voix ● Tes recettes bizarres que tu improvises totalement ● Tes raccourcis qui rallongent ● Les soupes que tu détestes ● Les petits gâteaux achetés le dimanche matin à la boulangerie ● Le cinéma avec toi ● Les musées où on va ensemble ● La fierté que j’ai quand tu es sur scène pour un concert ● La radio très tôt le matin ● Le sel que tu oublies de mettre dans les plats ● L’odeur du papier d’Arménie qui nous envahit ● Mes cheveux emmêlés que tu arraches sans merci pour me coiffer ● Mes chignons de danseuse que tu n’arrives pas à faire ● Tes énervements en voiture et moi qui dis « klaxonne ! » ● Et ré ré mi fa ré do si la fa ré mi fa sol fa mi ré si… ● Devine !
La vie n’est pas toujours juste,
Il ne faut pas embêter plus fort que soi,
Il ne faut pas non plus qu’on nous manque de respect,
Je n’aimais pas la prof d’allemand,
Les vrais amis sont ceux qui savent nous écouter et nous comprendre,
Il faut profiter des choses tant qu’on les a, car les bonnes choses s’en vont vite,
Les gens différents sont, soit très aimés, soit détestés,
Tout le monde n’est pas égal, il y a des gens plus importants,
Pour avoir de belles choses il faut faire des efforts,
Le temps est précieux, il ne faut pas le gâcher,
Dans la vie, tu ne peux pas forcer les gens à t’aimer,
Parfois les gens ont des réactions bizarres, il ne faut pas chercher à savoir pourquoi,
Dans la vie, il est plus facile de se détester que de s’aimer.
Il y a, je pense, beaucoup de choses que j’ai oubliées, mais j’ai appris et j’apprendrai encore beaucoup.
manger
aller
louer
Manger de bonnes glaces Berthillon
Aller à l’exposition La Comédie-Française s’expose au Petit Palais
Louer le DVD du film Titanic
chercher
s’entendre
retrouver
Chercher un centre équestre
Bien s’entendre
Retrouver un équilibre !
se balader
voir
regarder
Se balader au jardin des Tuileries
Aller voir Intouchables au cinéma
Regarder Fais pas ci, fais pas ça
aller
visiter
retourner
Aller à l’expo Game story
Visiter le Mémorial de la Shoah
Retourner au Musée vivant du Cheval
Les parents ne font-ils rien d’autre pour leurs enfants que semer des repères, de petits cailloux blancs, miroitant quand il fait trop sombre, distillant une lumière constante et sûre ? Ne cherchent-ils pas sans cesse à tracer des chemins d’amour, que leurs enfants n’emprunteront peut-être plus, une fois devenus grands, mais dont ils garderont le tracé enfoui quelque part en eux ?
J’espère, ma fille, ma si grande, ma princesse du bout du monde, t’avoir suffisamment ensemencée d’amour et de confiance en toi.
Je ne t’ai pas mise au monde ; néanmoins, je t’ai placée au cœur du monde, là où il palpite, là où il s’invente. Et je sais que tu ne resteras pas au bord du chemin, mais que tu sauras empiler tes pierres de bâtisseuse.
Je viens de relire une phrase de Maria Montessori, la célèbre pédagogue italienne. « N’élevons pas nos enfants pour le monde d’aujourd’hui » dit-elle « Ce monde n’existera plus lorsqu’ils seront grands. Et rien ne nous permet de savoir quel monde sera le leur : alors, apprenons-leur à s’adapter. »
Dès le début de ta vie, il t’a fallu apprendre à t’adapter. Et tu es plutôt douée pour cela. Je te revois, dans des situations nouvelles, observant, calmement, jaugeant, puis, une fois le tour de la question fait, te lançant dans l’action. Il nous a toujours semblé primordial, à ton papa et moi, de ne pas trop te protéger pour te permettre de te confronter à toutes sortes de situations et gagner peu à peu confiance en toi. En acceptant les défis, on devient un être libre.
Je viens de passer un mois à regarder défiler vingt ans de ta vie et toutes ces situations qui t’ont permis de grandir. Dans les albums photos, au travers de nos lettres et tous les souvenirs empilés ici ou là, je t’ai vue à nouveau grandir, en accéléré, et j’en sors comme étourdie. Un peu nostalgique, aussi. Je désirais tant de choses pour toi, alors que tu n’avais que quelques mois ! Ai-je assez construit ? T’ai-je assez transmis ? N’ai-je rien gâché ?
Je sais qu’il est ridicule de gémir sur le temps qui passe, stérile d’avoir des regrets !
Maintenant que le livre de ma « grande petite » est presque fini, je vais pouvoir lever les yeux de mes pages et envisager l’avenir avec toi. Oh ! Que je l’imagine radieux ! Combien encore ai-je envie de partager !
Toi, tu appréhendes un peu ces vingt ans, avec tous leurs possibles à portée de main et tous les doutes qui les accompagnent. Cela prend du temps de s’élever au rang de ses propres rêves. Sois patiente. Sois confiante.
Un mot te va bien : ardente. Tu es ardente. Tu as la joie sauvage des passionnés. Essaie de toujours garder en toi cette pulsation vive qui t’entraîne vers les flux du monde. Porte sur la vie un regard optimiste, quoi qu’il en soit. Tout est histoire de regard, tu le sais. Nous t’avons suffisamment parlé du verre à moitié plein ou à moitié vide !
Garde ce goût que tu as pour les autres. Pour peu qu’ils soient bienveillants, ils te feront grandir. Par-delà nos différences, comme tu m’as permis de grandir, de m’agrandir !
Ne triche pas avec qui tu es ; ne te joue pas le grand jeu, en contournant tes manques, en masquant tes erreurs. Rapproche-toi de celle qui est en devenir, se cherche et s’invente.
Je te revois petite fille, si pleine de gaieté, de créativité et d’énergie. Je te regarde aujourd’hui, jeune femme, dessinant elle-même la cartographie de sa vie. Et ces deux-là, je les aime, d’un même amour, et les larmes me viennent tout autant quand je pense à l’une ou à l’autre.
Hier soir encore, tu disais ta peur de perdre celui ou celle à qui tu donnes ton amour ou ton amitié. Ta tendance à rompre toi-même le lien, par anticipation, pour être sûre de n’avoir pas à souffrir.
Je te le dis, avec tout mon amour de maman : sois sans crainte, tu es infiniment digne d’être aimée.